Tables rondes > 5️⃣ · Circulations politiques et militantes internationalesTable 5"Circulations politiques et militantes internationales"Le rôle des militant·e·s a été réévalué par l’historiographie récente de l’histoire des relations internationales. Au cours d’un second XXe siècle marqué, dans les Amériques latines comme en Europe, par le recours à la violence comme forme d’expression contestataire ou comme modalité première de la répression, ces circulations ont tour à tour été encouragées et mises en œuvre volontairement ou entreprises dans l’urgence et de manière contrainte. Pensées depuis les Amériques latines, ces mobilités ne concernent pas uniquement les milieux de gauche, voire d’extrême gauche, étudiés dans le cadre des exils politiques et de la transnationalisation de la lutte armée dans les années 1960-1970. Elles se déploient aussi au sein des réseaux d’extrême droite et touchent également les formations politiques plus traditionnelles. L’objectif de cette table sera d’étudier, dans une perspective globale, les modalités de circulation des militants politiques entre les Amériques latines et l’Europe. Quel est le rôle de ces circulations dans la genèse des réseaux militants transnationaux ? En quoi ces circulations participent-elles de la redéfinition des identités et des pratiques politiques collectives ?
Modération Discussion Intervenant·es Aldo Marchesi [Université de la République] Parmi les ruptures successives suscitées par le débat sur la nouvelle gauche, une des ruptures majeures a été la critique des internationalismes traditionnels. L’histoire de radicalisation d’une grande partie des nouveaux groupes armés créés dans les années soixante a été associée au départ des internationales communistes, socialistes et trotskystes. Cette situation les a amenés à repenser leurs conceptions de l’internationalisme et leurs politiques d’alliance internationale. Les nouvelles conceptions impliquaient de penser le monde dans une perspective plus large, dans laquelle l’Europe n’était plus nécessairement le phare des idées internationalistes. Les politiques de l’Alliance ont été reformulées en fonction des possibilités et des limites qu’offraient à ces groupes les nouveaux équilibres de la guerre froide dans le cône Sud. Dans la présentation, je travaillerai autour de trois stratégies de politique étrangère développées par ces groupes. D’une part, la stratégie de la révolution continentale de la révolution latino-américaine, basée sur des idées antérieures sur l’identité continentale et en termes d’alliances, était liée au projet de politique étrangère cubaine développé principalement dans les années 1960. Ce projet incluait également une dimension tiers-mondiste à travers la proposition tricontinentale testée par les Cubains. La deuxième stratégie fait référence aux relations que ces groupes sud-américains ont développées avec d’autres mouvements de la nouvelle gauche européenne et américaine. Dans ces cas-là, les alliances n’ont pas connu de développement significatif en raison des conditions de la guerre froide. Enfin, nous étudierons la manière dont ces organisations armées étaient liées à une nouvelle forme d'internationalisme politique, comme les mouvements de défense des droits de l'homme liés aux organisations internationales et aux gouvernements occidentaux solidaires de cette cause et les mouvements sociaux dans les pays occidentaux. *** Celina Albornoz [Université nationale de San Martín] Le Mouvement nationaliste Tacuara (MNT), groupe de la droite nationaliste argentine qui a acquis une grande importance sur la scène politique entre le milieu des années 1960 et le début des années 1970, comptait dans ses rangs plusieurs militants qui, loin de développer une activité ancrée exclusivement dans le champ national territoire, ils circulent dans tout l’espace atlantique et établissent des liens avec des groupes européens d’extrême droite. La présentation se concentrera sur les trajectoires transnationales de certains (anciens) membres du MNT qui ont exercé un double militantisme, simultanément en Argentine et dans les pays européens. Plusieurs d’entre eux s’intégraient ou étaient étroitement liés, à des degrés divers, à des groupes et mouvements néofascistes en Espagne et en Italie. *** Elisa Santalena [Université de Grenoble] Pour comprendre les racines de l’amitié italo-chilienne ainsi que les liens sociaux, politiques et économiques qui se tissent entre les deux pays de la fin des années 1950 au coup d’État civico-militaire, nous allons reconstruire brièvement les étapes qui amènent la Démocratie Chrétienne italienne – le principal parti qui gouverne la Péninsule - à soutenir la trajectoire politique du Partido Demócrata Cristiano chilien. Ce dernier représente non seulement le nouveau visage, mais surtout l’avenir d’un continent qui se doit de rêver à un avenir meilleur, où la pauvreté et l’analphabétisme doivent faire place à un développement qui lui permette d’atteindre un niveau de vie le plus proche possible du monde occidental. Aux yeux de Rome, dans le contexte de la Guerre froide, le PDC chilien symbolise la nouvelle voie ou, mieux encore, la « troisième voie » : libre, démocratique, catholique et, surtout, aux antipodes du castrisme. Eduardo Frei Montalva, figure de proue du parti, sera ainsi perçu comme l’homme chargé de défendre le peuple chilien aussi bien du monopole économique étasunien que du risque marxiste. Un démocrate-chrétien de la même veine qu’Alcide De Gasperi – au moins en apparence – à soutenir à tout prix, pour tenter de conférer à l’Italie un nouveau rôle dans la diplomatie internationale. *** Bibliographies sélectives Albornoz, C. (2022). La extrema derecha entre dos continentes: La dimensión transnacional del Movimiento Nacionalista Tacuara (1957-1980). Anuario IEHS, 37(2), 113–137. https://doi.org/10.37894/ai.v37i2.1473 Albornoz, C. (2021). La derecha nacionalista argentina en perspectiva transnacional: Historia y memoria del Movimiento Nacionalista Tacuara (1957-1973) (Tesis doctoral). Università degli Studi di Padova - Universidad Nacional de San Martín, Padova. Gutman, D. (2012). Tacuara. Historia de la primera guerrilla urbana argentina (2. ed.). Buenos Aires: Sudamericana. Tanya Harmer, Allende's Chile and the Inter-American Cold War. Herrán Ávila, L. A. (2015). Las guerrillas blancas: Anticomunismo transnacional e imaginarios de derechas en Argentina y México, 1954-1972. Quinto Sol, 19(1), 1–26. https://doi.org/10.19137/qs.v19i1.963 Aldo Marchesi, Latin America's Radical Left: Rebellion and Cold War in the Global 1960s. Padrón, J. M. (2017). “¡Ni yanquis, ni marxistas! Nacionalistas”: Nacionalismo, militancia y violencia política: El caso del Movimiento Nacionalista Tacuara en la Argentina, 1955-1966. La Plata: Universidad Nacional de La Plata; Universidad Nacional de Misiones; Universidad Nacional de General Sarmiento. Eric Zolov, Expanding our Conceptual Horizons: The Shift from an Old to a New Left in Latin America. *** |
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